"Ceux qui voulaient me briser y sont parvenus..."
extrait de la dernière lettre de Jacques Bouille à sa famille





lundi 27 juin 2011

Est-ce donc cela… ?


Comme on a pu récemment l’entendre, M. Tron, présumé innocent, a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire pour viol, etc. Il risquerait, s’il était reconnu coupable, jusqu’à 20 ans de prison. Il n’a pas été placé en détention provisoire.
J. Bouille, qui aurait dû bénéficier de la présomption d’innocence, a été mis en examen pour blanchiment, corruption, prise illégale d’intérêt, etc. Il aurait risqué, s’il avait été reconnu coupable, jusqu’à 5 ans de prison. Il a été placé en détention provisoire pendant plus de 5 mois. C’est la longue durée de cette détention qui a eu raison de lui et l’a poussé au suicide. Quant à moi, mise en examen et placée sous contrôle judiciaire, sur ordre des juges d’instruction, je n’ai jamais pu rendre visite à mon époux. Je ne l’ai jamais revu vivant depuis le jour de notre séparation au palais de justice de Perpignan, le 17 décembre 2008.

L’instruction de M. Tron -ceci a été dit et bien répété dans les médias- sera menée à charge et à décharge. Quelle merveille !
Mais pourquoi n’en est-il pas ainsi pour tous les prévenus présumés innocents ? Pourquoi des traitements aussi différents, selon que l’on s’appelle M. Tron ou M. Bouille ?
Est-ce donc cela, la justice, en France ?
« Selon que vous serez puissant ou misérable… »
Y aurait-il une justice à deux vitesses... ou plus encore ? Certains palais de justice seraient-ils plus répressifs, plus coercitifs que d’autres ? Ont-ils réellement toute latitude d'agir à leur guise sans jamais avoir à assumer les conséquences de leurs décisions ?
Est-ce bien normal ?
Mon mari n’a ni tué ni violé. Pourquoi avons-nous dû subir un tel traitement et un tel acharnement de la part de la justice locale ?
La justice se vengerait-elle sur les « petits » de ce qu’elle ne peut faire aux « puissants » ?
Que de questions ne sommes-nous en droit de nous poser devant un comportement et un traitement aussi différents !
Où sont-ils donc nos principes de Liberté, d'Egalité... que nous nous plaisons à rappeler si souvent et que nous désirons transmettre à nos enfants ? Plus que des mots ? En tout cas, le terme d'équité semble, lui, avoir réellement perdu tout son sens.
Loin de moi l’idée de vouloir faire subir à M.Tron une détention provisoire : je sais trop ce qu’il en coûte de se retrouver, seul, à longueur de journée, dans une cellule de neuf mètres carrés. Je sais trop bien que cette torture peut amener un être humain à souhaiter sa propre mort.
Non, je suis contre le principe de la détention provisoire, j’ai déjà eu l’occasion de le dire sur ce blog -et surtout contre l’usage très particulier et les abus que l’on en fait malheureusement dans notre pays, celui des Droits de l’Homme, au XXIe siècle qui plus est !-, mais ce que l’on ne fait pas à M.Tron, pourquoi l’a-t-on fait et le fait-on subir à d’autres ?

La justice française, dans cette affaire, prend-elle soudain modèle sur la justice nord-américaine, pourtant si critiquée il y a peu par le milieu médiatico-politique dans l’affaire Strauss-Kahn ?
S’aperçoit-elle subitement qu’elle inflige aux prévenus -présumés innocents, en principe- un traitement de coupables ?
S’aperçoit-elle, enfin, qu’elle tue des citoyens, des êtres humains, en les condamnant à l’enfermement avant même qu’ils ne soient jugés et se met-elle tout à coup à vouloir éviter le pire ?
Si ce n'était pas le cas... on pourrait en arriver à croire qu'il s'agirait alors tout simplement d'un choix, très volontaire. Et infâme.

M.-A. Bouille